Aujourd'hui, l'aboutissement à une catastrophe sociale de la gestion des affaires du pays fait revivre la grande idée d'une conférence nationale déjà supportée par certains et rejetée par d'autres. Cette fois-ci, l'appel est lancé par le 'gouvernement-mécanicien' et a reçu un accueil chaleureux. Cependant, les hésitations d'alors se transforment en grandes questions sur ce que doit être le contenu de la conférence. Peu importe ! L'esprit d'une telle initiative est d'enfanter un nouvel ordre social. Pourquoi, quand la constitution de 1987 n'avait que ça comme but ? En effet, depuis la naissance de celle-ci, la société s’y accroche aveuglément, ignore l'injustice qui l'anime et insiste sur sa conservation pour protéger la 'démocratie participative' en déconfiture. Loin d’être un empêchement aux violations de la constitution et à la corruption, toute refonte d’Ayiti doit viser un nouvel ordre social axé sur la justice et l'équité.
Face à un dysfonctionnement social, il est correct de revenir à la case de départ et reconsidérer la position de chaque membre de la société sur une base égale. En d'autres termes, la justice et l'équité doivent être le point focal de cette conférence nationale qui doit produire un nouvel accord de coopération (contrat social ou constitution) entre des citoyens rationnels. Invitant la collectivité ayitienne à bien réfléchir sur ces éléments, ce texte :
I: décrit des situations initiales pouvant donner lieu à un accord de coopération entre différents citoyens rationnels ;
II: met en lumière l’essence d'une bonne constitution ;
III: rappelle le vrai rôle de l’Etat ;
IV: identifie les axes d’une bonne constitution ;
V: démontre la nécessité d’une bonne coordination des activités économiques ;
VI: attire l’attention sur la nature maladive des constitutions d'Ayiti particulièrement celle de 1987 ;
VII: soulève des questions pertinentes autour d'une nouvelle constitution pour Ayiti.
I: De la cause d’un accord de coopération entre citoyens rationnels
Recourir à un accord de coopération est toujours fonction d’un désavantage dans le processus de maximisation du bien-être individuel, quand différents individus ou groupes sont appelés à partager les ressources d’une même communauté pour leur survie. Cet inconvénient peut se produire quand :
• un groupe tente de répondre à ses propres besoins sans l’apport d’un autre ;
• les groupes vivent dans une méfiance mutuelle constante ;
• un ou plusieurs groupes font partie d’une majorité victime des abus perpétrés par un autre en position privilégiée ;
• un ou plusieurs groupes subissent l'attitude collective anarchique et autodestructrice ;
• un ou plusieurs groupes appréhendent l’effet d’une désintégration imminente de la communauté.
En raison de l’incapacité d’autosuffisance de tous, d’où l’interdépendance naturelle des humains, quiconque voudrait faire cavalier seul souffrirait d’un manque en voulant maximiser son bien-être. Là où la confiance, nécessaire à une interdépendance concrète et fructueuse, fait défaut, les individus entreprendraient rarement des activités bénéfiques impliquant l’autre par crainte d’être dupés ; tel serait un handicap à une vision collective. Ceux, qui agissent arbitrairement au détriment d'un groupe, mais en leur faveur, encourraient toujours le risque de se trouver en position inverse un jour. Dans d’autres cas, les individus trop inquiets hésiteraient à s’investir dans la communauté. Cette atmosphère d’incertitude fait planer une espérance de vie très courte sur toute entreprise visant à améliorer le sort de l’un ou de l’autre. Comme conséquence, le progrès socioéconomique serait inhibé par des discordes chroniques et des vicissitudes sociales ou politiques. Ainsi, la coexistence pacifique serait fragilisée et nul citoyen ne saurait prétendre réaliser son potentiel humain.
En dépit d’une conduite égoïste, aucun membre rationnel d'une société ne souhaiterait être l’objet de ces préjudices. D’une manière ou d’une autre, le rationnel égoïste inclus dans son calcul l’autre, anticipe les méfaits des interactions et tente de faire obstacle à leurs causes. Conscients de ces horizons flous, ils s'engagent dans une réflexion collective pour trouver des normes sociopolitiques acceptables et ériger un système approprié avec un mode de fonctionnement juste. Tout cela nécessite l’acceptation des principes généraux dont les avantages ou désavantages qu'ils comportent pour l'un ou pour l'autre ne sont pas prévisibles dans la phase initiale. Dans cette optique, l'ossature d’une constitution politique basée sur le général doit nécessairement embrasser les intérêts de tous et non ceux de certains.
II: De l’objectif et de l'essence d’une bonne constitution
Dans la nécessité de restructurer la collectivité, il faut définir 'l’idée collective de justice', et la fonction de l’appareil Etatique. L’objectif est de permettre aux individus de mieux réaliser leurs intérêts, remédier à tout déséquilibre afin de rendre le terrain collectif praticable. Dans ce cas, l’appareil Etatique n'a qu’un apport administratif aux activités individuelles entreprises pour apaiser ou résoudre les conflits, encourager les externalités positives et neutraliser celles qui sont négatives. Repartant de l'origine, l’échafaudage d’une constitution politique comme outil idéal exige une approche rationnelle de la part des groupes qui tentent de maximiser leurs avantages.
Etant un accord de coopération entre individus rationnels pour faire régner la justice et l’équité parmi eux, une constitution doit répondre à un besoin d'harmonie collective et prendre au niveau conceptuel une allure générale sur les formes escomptées. Dénuée de spécificité, elle accorde à chacun une chance égale d'être affecté positivement ou négativement par ses provisions. Donc, au temps initial, deux principes cardinaux doivent être à la base de cet accord et régir les interactions subséquentes :
1) faire régner l’égalité individuelle au niveau des droits et devoirs ;
2) ériger un système compensatoire permettant de pallier l’inégalité économique et sociale qui est un phénomène inhérent aux intérêts propres des individus.
Considérant ces principes, tout individu sait qu’à tout moment dans le processus de vivre ensemble, l’avantage ou le désavantage peut lui revenir plutôt qu’à un autre. Au préalable, nul n’est sûr de son rôle futur dans l’évolution de la société et ne peut prévoir sa position suite à des décisions prises. La chance de jouir ou de ne pas jouir des bénéfices, qui en découlent, est égale pour tous.
Ces caractéristiques assurent sa viabilité, sa validité, son efficacité et sa longévité. En effet, les concernés respecteront les décisions et accepteront les résultats. Dans le cas contraire, elle devient provisoire en prenant un cours cyclique voué à une instabilité politique chronique. A tour de rôle, chaque gouvernement peut s'octroyer le droit de la retailler en sa faveur. En conséquence, la société restera injuste et pauvre jusqu'au moment où un groupe conscient et rationnel décide de se comporter autrement en rendant la constitution une pour tous.
III: Du vrai rôle de l’Etat
Souvent, ceux, qui sont pour une refonte, entendent uniquement une nouvelle architecture du système politique et oublient que l’Etat n’a qu’un rôle auxiliaire. Il est compris qu’une société meurtrie par l’abus du pouvoir veut empêcher le renouvellement d'un ordre social abusif quand la nécessité de reconstruire s’impose. A ce stade, les parties en question peuvent s’organiser sous différentes formes d’association leur permettant de maximiser leurs avantages. Ceci explique une certaine volonté de tolérer la présence de l’un ou de l’autre. Malgré tout, un climat de méfiance mutuelle peut toujours régner et rendre difficile tout entendement de vivre bien ensemble. Une telle situation oblige en conséquence la présence permanente d’un ‘veilleur’ de bien-être individuel et collectif. Lui seul peut faire respecter et protéger le droit et les limites de chacun, car de là commencent la liberté individuelle et la paix collective. D’où la nécessité de bien définir le rôle et les responsabilités de ce ‘veilleur’ dans la conception d’un pacte. Muni de l'autorité nécessaire, l'Etat comme ‘veilleur’ doit garantir la jouissance des droits naturels et devoirs des différents individus ou groupes ayant des intérêts divergents, mais désireux de coexister dans la paix sur un même territoire et y partager les mêmes ressources.
Impliqué à l’origine dans le pacte, l’Etat n’a que pour rôle de garantir le bien-être individuel et celui de la collectivité en conséquence. Rien ne change même quand il s’agit de concevoir un nouveau pacte ou d’en modifier un qui est en cours. Ce qu'il faut retenir comme élément primordial est l'individu. Donc, faire du système politique le point de mire d’une refonte constitutionnelle parce que tel ou tel gouvernement viole constamment les principes établis induit en erreur. En fait le problème réel n’est pas le fait qu’on viole la constitution, mais plutôt l’absence de justice, le manque d’équité et l’inexistence d’un système correctif capable d’instaurer un certain équilibre social. Comme la désintégration sociale du pays semble être au cœur de l'appel pour une conférence nationale, il est à se rappeler que le système politique n’est qu’au service d’une visée plus noble, le bien-être individuel et collectif par la garantie du droit naturel de chacun de pouvoir réaliser son potentiel humain sans être empêché par les caprices des autres.
IV: Des dessous de l’économie et du politique dans une bonne constitution
Originellement, l'économie n'est rien d'autre qu'une activité humaine exigeant l’exploitation et le partage des ressources naturelles pour la satisfaction des besoins de l’Homme. Leur insuffisance par rapport au nombre d'individus à la recherche d'une satisfaction individuelle est une source de conflits importante. Ceux-ci deviennent virulents et menacent la survie collective, quand l'exploitation de ces ressources engendre des inégalités socioéconomiques et qu'il n'existe aucun dispositif de partage des avantages ou de compensation. Là où certains individus ont une plus forte chance de réaliser leur potentiel humain que d'autres sans une possibilité de permettre aux perdants ou malchanceux d'améliorer leurs conditions de vie, la stabilité collective est compromise et tout accord de coopération qui n'a aucun outil préventif ou correctif est loin de survivre.
S'il n'y avait pas le spectre de ces types de conflits, aucune société n'aurait besoin du politique pour l'administrer. En d'autres termes, l'économie est le germe du politique qui fait usage de la constitution comme outil administratif de conflits. Il revient à garantir à chaque individu son droit de partage équitable ou droit de propriété et d'entreprendre des activités de production ou commerciales menant à sa satisfaction sans provoquer des externalités négatives affectant un autre ou le reste de la communauté.
Avec des activités différentes entreprises par chaque membre de la collectivité, il faut une administration efficace pour une exploitation optimale des ressources. Pour cette tâche et par la constitution, des instances appropriées doivent être conçues et dotées de l'autorité appropriée. Les modalités de l’entreprise politique se rangent côte à côte de celles envisagées pour l'économie. Elle est tout autant importante parce que d'elle dépendent le respect de la constitution et le bien-être collectif. Comment choisir les représentants et les catégoriser dans l'exercice de leur responsabilité administrative est crucial ? Il est impératif d’identifier leur aptitude dans la gestion du collectif et de prévoir leur capacité d'abus du pouvoir ou leur faiblesse face à l'impulsion de satisfaire leurs intérêts personnels au détriment de la cause collective.
V: D’une bonne coordination de l’exploitation des ressources disponibles
Les axes d'une constitution étant identifiés, formuler leurs particularités pour garantir sa stabilité et légitimité est un processus délicat quand les vues divergentes sont considérées. Comment satisfaire par des principes généraux les intérêts individuels quand l'intérêt collectif est aussi ciblé ? Ne garantissant pas à chacun une jouissance égale des avantages socioéconomiques, une bonne constitution offre plutôt l'équité et la chance à tout citoyen de se réaliser. Chaque individu doit pouvoir se situer sur une courbe d'interdépendance collective permettant un certain degré de satisfaction individuelle, différent qu'il puisse être l'un de l'autre. Une société bien constituée nourrit cet esprit pour garantir une marche collective paisible par :
a) La garantie du droit au travail
Une bonne constitution garantit à chaque individu la jouissance du droit au travail pour lui faciliter l’exercice des activités productives dirigées vers la réalisation de son potentiel humain dans la paix. Les moyens de se nourrir comme premier souci de tout homme doivent être garantis. Donc, le travail comme sa propriété naturelle et son moyen principal de survie doit être facilité, encouragé et protégé. Etant donné que le travail est fonction de l’exploitation des ressources disponibles par des citoyens, il faut promouvoir et bien coordonner leurs différentes activités. Ceci dit, l’exploitation des ressources, qui n’est autre que la production ou la transformation de l’environnement, doit répondre à la satisfaction des besoins de chacun. C’est ce qui lui attribue une présence prépondérante dans l’élaboration d’une constitution et rend incontournable le droit au travail de chaque citoyen. Encore, des principes généraux détermineront la structure du partage des ressources et la position de chacun dans le processus d’exploitation.
b) La division équitable de l’espace partagé
Si l’ultime but de la formation d’une société est de faciliter une coexistence pacifique parmi les individus, il importe de délimiter le champ d’actions de chacun dans l'espace partagé. Ceci permettra d’éviter tout empiétement volontaire ou involontaire traduit en abus et qui peut résulter en conflits menaçant l’existence de la société. Suivant la division de l’espace partagé, le rôle ou la fonction des occupants s’établit strictement sur la gestion de leur part. La prévention ou l'apaisement des discordes relève des autorités politiques et administratives qui représentent différents groupes. Eu égard au principe du droit au travail de chacun, leurs efforts seront conjugués vers un objectif commun. Comme deuxième élément d’une bonne constitution, la nature de cette gestion dépend de la quantité de ressources disponibles par rapport au nombre d’individus composant la société. Une bonne constitution doit faire une répartition équitable de l’espace, et se prononcer sur la forme que doit prendre sa gestion et sur comment la communauté politique doit être peuplée.
c) Dans l’esprit d’une bonne constitution
Partant de ces précédents points de vue, toute bonne constitution prend l’allure générale favorisant son application dans le présent et le futur sans aliéner un groupe au profit d’un autre. Ainsi, elle répond aux préoccupations premières des individus vivant ensemble dans une communauté en leur garantissant, dans la paix et la sécurité, la jouissance du droit de réaliser leur potentiel humain.
Dans cette perspective, une bonne constitution :
• établit l'égalité des droits et devoirs de chacun ;
• protège chacun contre tout abus d’autorité ;
• assure principalement la garantie du bien-être individuel ;
• met en place un système compensatoire permettant de remédier aux externalités négatives ;
• définit le partage du pouvoir, le rôle des institutions politiques assumant le pouvoir et celui des individus en qui il est investi ;
• érige un dispositif permettant de sanctionner quiconque n’observant par les principes préconisés.
Etant l’ossature d’une association politique entre différents individus, la constitution est la référence ultime donnant lieu à la bonne interprétation de toutes lois subséquentes. Somme toute, elle permet l'élaboration des principes permettant le bon fonctionnement d'une société.
VI: De la nature maladive des constitutions d’Ayiti
Depuis sa naissance, Ayiti a connu de nombreuses constitutions dans l’espoir que les mauvaises conditions de vie des citoyens changeraient. Plutôt, elles s’empirent davantage ! A la naissance de chacune d’elle, l’idée centrale est une société équitable, mais selon la perception personnelle des privilégiés, et non selon celle de la collectivité. Elles se font toujours l’objet d’une lutte de pouvoir au détriment de la cause collective pour une jouissance individuelle égoïste et irrationnelle des bénéfices du pouvoir. Le collectif étant négligé, le remaniement de la constitution devient nécessaire à chaque passation ou usurpation du pouvoir. Le besoin de conserver les privilèges attelés à la prise du pouvoir requiert des provisions favorables à ses détenteurs, mais qui neutralisent ou excluent tous aspirants au pouvoir ou tous membres du pouvoir précédent. Ayant cette nature, aucune constitution ayitienne ne fait montre des qualités d’une bonne constitution, ce qui rend chroniques le problème politique et la misère économique du pays. La constitution de 1987 hérite les tares de ses aînées par son manque de légitimité, sa fausseté et son caractère venimeux.
a) les tares de la constitution de 1987
La dernière en date, la constitution de 1987, est l’objet de multiples violations non seulement dans son application, mais aussi dans sa conception. Alors que le grand espoir était de corriger les injustices perpétrées par une dictature d’une trentaine d’années presque. Nonobstant, elle s’est mise à exclure en privant certains de leur droit de participation dans la gestion du pays. L’obsession de radier un groupe de la scène politique a donné naissance à une rigidité politique qui rend difficile la gestion politique d’où l'impasse d’aujourd'hui. Ce problème est sûr de demeurer sans une modification de la constitution. Contrairement aux croyances de beaucoup, tout gouvernement accusé de jouir excessivement du plein pouvoir n'était pas la source du problème actuel. La nature maladive de la constitution en est coupable. L’état actuel des choses serait pareil indifféremment du groupe au pouvoir. Son caractère rigide et débile fait d’elle une tautologie en perpétuant l’injustice et le désordre qui au départ a donné lieu à son existence. En effet, elle n’offre aucune stabilité politique.
b) le manque de légitimité de la constitution de 1987
Considérant les refontes multiples des principes guidant l’association politique ayitienne, les réformes politiques entamées au départ de la dictature devraient être sérieusement débattues. La constitution ayitienne comme produit tangible de changement de pouvoir dans un moment chaotique perd toute sa légitimité sans un débat public réel où les citoyens devraient être guidés objectivement sur la forme que la restructuration allait donner au pays. Ils sauraient que leurs préoccupations premières n’étaient pas adressées et que barrer la route à certains ne constituait aucunement un élément garantissant leur bien-être. En fait, le contenu de la constitution était présenté en référendum à la population comme une alternative au régime dictatorial de Duvalier. L'état d'âme du pays de l'époque était le changement et a été bien exploité par les concepteurs irrationnels de la constitution de 1987 qui n'étaient pas représentatifs réels de la population, mais des défenseurs propres de leurs intérêts.
c) la fausseté de la constitution de 1987
Dire que la constitution de 1987, un accord régissant la coexistence d’un peuple, a été approuvée à l’unanimité est une aberration. La diversité d’intérêts existant au sein d’une collectivité est l’obstacle absolu à une telle approbation. Si pour valider des principes gouvernant la tenue harmonieuse d’un peuple la condition première était l’accord unanime, une constitution n’aurait jamais vu le jour. Cependant, la nature collective d'une entente exige l'adhésion d’une forte majorité des citoyens pour garantir sa légitimité et le respect continuel de ses principes. L’unanimité issue du référendum reflète la fausseté de la constitution de 1987. Seule la proposition de refaire la constitution aurait dû être présentée sous cette forme et non la constitution elle-même après être conçue avec toute son imperfection. En réalité, il est plus aisé d'obtenir l'accord de tout le monde sur la nécessité d’un changement de régime ou sur les règles permettant de concevoir une constitution que sur les principes de justice et d’équité dans la collectivité.
Rien n’avance qu’elle n’était pas revêtue de son caractère unanime comme attribué, pourtant tout indique que les causes collectives ou les raisons de l’association politique n’ont jamais été prises en compte. En effet, l’essence des deux axes d’une bonne constitution est techniquement absente. La réalité dénote que la fièvre anti-duvaliériste en était le point focal et a poussé dans l’ombre la cause collective. Présentée à la collectivité sous cette bannière, l’unanimité était très probable. Lors, tout ce qui symbolisait le renversement ou l’éjection de la dictature duvaliériste aurait trouvé l’approbation unanime.
d) le caractère venimeux de la constitution de 1987
Excluant dès le départ une partie de la population dans l'esprit de vengeance et n'ayant pas réellement débattu le contenu de la constitution l'ont rendue mauvaise. Dans le cas contraire, la nouvelle constitution n'aurait pas été votée à l'unanimité. Toutefois, si avant d'être présentées au public les nouvelles propositions étaient débattues objectivement et correctement, les groupes opposés aux nouvelles provisions auraient préféré une révision dont le résultat serait impartial. Par exemple, en considérant l'esprit de l'article 291 qui exclut les duvaliéristes des affaires publiques du pays pendant une période de 10 ans, une juste révision aurait pu être celle-ci : tout gouvernement précédent doit être examiné après son mandat par un conseil d'éthique indépendant prévu pour cette fonction. Seront appelés en justice tous ceux accusés de corruption sous peine d'emprisonnement, d'indemnité ou d'être radiés indéfiniment des affaires publiques du pays, si trouvés coupables. Cependant, le pardon peut être accordé, et le droit de participation aux affaires du pays peut être regagné si les coupables sont graciés par un gouvernement en fonction.
Avec une telle proposition, la balance ne pencherait pas contre un groupe spécifique, car tous les groupes se sentiraient affectés dans le futur sans savoir trop comment, tout en ayant une chance de se racheter. L'ignorance de sa position future offrirait à chacun une opportunité égale de s'identifier aux conséquences d’une action posée. Etant citoyens du pays, ils ont tous un droit de participation dans ses affaires. Leurs droits peuvent être retirés indéfiniment et rétablis aussi. Avec une position objective et juste, ceux qui sont immédiatement affectés consentiraient de se faire à la provision révisée sans se croire être ciblés. Il y aurait beaucoup plus de chance de voir les principes de la constitution observés par une forte majorité et il serait plus facile de la faire respecter.
VII: Les préoccupations autour d'une nouvelle constitution pour Ayiti
Les mêmes erreurs sont à éviter. Tenant compte de la tendance actuelle de certains pour une refonte, comment la réaliser quand les conceptions de justice sont différentes ? Cette atmosphère impute déjà toute possibilité d’une approbation unanime à l’image de la constitution de 1987. Comment répondre aux refus de participation du secteur politique lésé par le départ de son leader ? L’idée d’une conférence nationale devant générer un nouveau contrat social n’est pas mauvaise en soi, mais l’entreprendre sera incorrecte si les 2/3 des composantes de la société n’y sont pas d’accord. Ce pourquoi, la sagesse oblige que l’idée de refonte soit présentée en référendum avant toute tentative d’élaboration d’un nouveau contrat social. Faire le contraire fausserait une telle initiative. Il ne suffit pas d’un appel pour rassembler les différents partis politiques, secteur privé, secteurs religieux et société civile de Port-au-Prince pour tout rendre légitime comme on a tendance de le faire pour tout. Qu’en serait-il des intérêts des autres régions du pays toujours négligées ? Etant exclues, leurs intérêts ne seraient pas défendus dans l’élaboration d’un nouveau contrat social.
Si la nature d'une constitution est la gestion du collectif au bénéfice de l’individu, faire d’elle un atout personnel l’empêchera de construire un cadre général pour élaborer les règles de base et inclure tout le monde. De telles caractéristiques ne peuvent lui offrir la flexibilité nécessaire à une longévité sans risque. En conséquence, l’effort mérité serait voué à l’échec et refléter l’image de la constitution de 1987.
Jean Poincy
Janvier 2005
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